Le jeu de rôle sur table (JdR) a toujours été une source d’inspiration majeure pour les jeux vidéo, forgeant un lien indéniable entre ces deux univers. Depuis les premiers jours de TSR, le premier éditeur de Dungeons & Dragons, jusqu’à l’arrivée des titres emblématiques tels que Fallout, Mutant Year Zero, les déclinaisons du Mythe de Cthulhu et enfin Baldur’s Gate 3, cette relation s’est non seulement maintenue mais aussi profondément enrichie.
Des JdR sur table de l'époque TSR à l'innovation vidéoludique récente
Les adaptations de D&D en jeux vidéo : de TSR à Wizards of the Coast
Dans les années 1980, l’imaginaire rôliste de D&D a débordé sur les jeux vidéo. De nombreux portages ont été fait sans les noms officiels de licence. Mais rien que ce qui était estampillé Donjons & Dragons vous donnera une petite idée de l’envie de poursuivre l’aventure du jeu de rôle sur table…
L’ère TSR (1982-1997)
- Advanced Dungeons and Dragons (1982) sur Intellivision
- Advanced Dungeons & Dragons: Cloudy Mountain (1982) sur Intellivision
- Advanced Dungeons & Dragons: Treasure of Tarmin (1983) sur Intellivision
- Advanced Dungeons & Dragons: Pool of Radiance (1988) sur PC, NES, Commodore 64, Apple II, Amiga, Atari ST
- Eye of the Beholder (1990) sur PC, Amiga, Mega-CD, Super Nintendo, NEC PC-98, Lynx
- Advanced Dungeons & Dragons: Champions of Krynn (1990) sur PC, Commodore 64, Amiga
- Eye of the Beholder II: The Legend of Darkmoon (1991) sur PC, Amiga, FM Towns, NEC PC-98
- Neverwinter Nights (1991) sur PC
- Advanced Dungeons & Dragons: Gateway to the Savage Frontier (1991) sur PC, Amiga, Commodore 64
- Advanced Dungeons & Dragons: Treasures of the Savage Frontier (1992) sur PC, Amiga
- Eye of the Beholder III: Assault on Myth Drannor (1993) sur PC, NEC PC-98
L’ère Wizards of the Coast (depuis 1997)
- Baldur’s Gate (1998) sur PC, Mac
- Baldur’s Gate : La Légende de l’Île perdue (1999) sur PC, Mac
- Planescape: Torment (1999) sur PC
- Baldur’s Gate II: Shadows of Amn (2000) sur PC, Mac, Linux
- Baldur’s Gate: Dark Alliance (2001) sur PlayStation 2, GameCube, Game Boy Advance, Xbox
- Baldur’s Gate II: Throne of Bhaal (2001) sur PC, Mac
- Neverwinter Nights (2002) sur PC, Mac, Linux
- Dungeons & Dragons Online (2006) sur PC (MMORPG)
- Baldur’s Gate: Enhanced Edition (2012) sur PC, Mac, Linux, iOS, Android
- Baldur’s Gate II: Enhanced Edition (2013) sur PC, Mac, Linux, iOS, Android
- Sword Coast Legends (2015) sur PC, Mac, Linux, PlayStation 4, Xbox One
- Baldur’s Gate III (accès anticipé depuis 2020) sur PC, Mac, Stadia
Des adaptations directes de licences de JdR en jeux vidéo
Au fil des années, de nombreux éditeurs de JdR sur table ont accordé des licences pour adapter leurs univers en jeux vidéo :
- Donjons et Dragons : la licence D&D a donné lieu à d’innombrables adaptations, des « Gold Box » de SSI dans les années 1980 à la série des Baldur’s Gate et Neverwinter Nights dans les années 1990-2000. Baldur’s Gate 3, actuellement en accès anticipé, s’inspire directement des règles de la 5e édition de D&D.
- Warhammer : L’univers dark fantasy de Games Workshop a connu de nombreuses adaptations, notamment la série des Warhammer: Dark Omen (1998), Warhammer Online: Age of Reckoning (2008) ou plus récemment Warhammer: Vermintide 2 (2018).
- Shadowrun : Ce JdR cyberpunk-fantasy de FASA a été adapté en jeu vidéo dès 1993 sur Super Nintendo. Plus récemment, la licence a fait l’objet d’une trilogie de jeux tactiques en tour par tour avec Shadowrun Returns (2013), Shadowrun: Dragonfall (2014) et Shadowrun: Hong Kong (2015).
- L’Appel de Cthulhu : le célèbre JdR horrifique de Chaosium a connu plusieurs adaptations, comme Call of Cthulhu: Dark Corners of the Earth (2005) ou le récent Call of Cthulhu (2018).
- Vampire : La Mascarade : la licence World of Darkness de White Wolf a été déclinée en plusieurs RPG, dont Vampire: The Masquerade – Bloodlines (2004), devenu culte pour son écriture et ses choix narratifs.
- Mutant Year Zero : ce JdR post-apo suédois a été directement adapté en tactical RPG par les studios Bearded Ladies et Funcom en 2018.
- Earthdawn : Également édité par FASA, Earthdawn se déroule dans un univers fantasy post-apocalyptique. Il a été adapté en un MMORPG éponyme en 2009.
- Cyberpunk 2020 : Le célèbre JdR cyberpunk de Mike Pondsmith a récemment connu une adaptation très attendue avec Cyberpunk 2077 (2020) par le studio CD Projekt Red.
- Paranoia : Ce JdR humoristique et satirique se déroulant dans un futur dystopique a été adapté en jeu vidéo en 2004 sous le titre Paranoia: Happiness is Mandatory.
- Pathfinder : Dérivé de la 3.5e édition de D&D, Pathfinder est devenu un des JdR les plus populaires. Il a été adapté en jeu vidéo avec Pathfinder: Kingmaker (2018) et sa suite Pathfinder: Wrath of the Righteous (2021).
- Wasteland : Si le premier Wasteland (1988) a directement inspiré la création du JdR papier éponyme, ses suites Wasteland 2 (2014) et Wasteland 3 (2020) peuvent être considérées comme des adaptations modernes de l’univers post-apocalyptique du jeu de rôle.
L'émergence des MMO, héritiers des jeux de rôle sur table
L'émergence des VTT dans le milieu du jeu de rôle : vers un rapprochement entre JdR sur table et jeux vidéo
Wizards of the Coast (WotC), l’éditeur de Donjons et Dragons, a récemment dévoilé D&D Digital, une suite d’outils numériques visant à faciliter la préparation et le déroulement des parties. Parmi ces outils, on trouve notamment un générateur d’aventures automatisé, capable de créer des scénarios complets en quelques clics. WotC explore également le concept de « Dungeon Master virtuel », un agent conversationnel basé sur l’intelligence artificielle qui serait capable d’endosser le rôle de maître du jeu. Grâce aux progrès des grands modèles de langage (Large Language Models ou LLM), ces IA pourraient à terme animer des parties, répondre aux actions des joueurs et générer du contenu narratif de manière dynamique.
L’introduction de la réalité augmentée pointe également son nez, avec des dispositifs tels que Apple Vision Pro et Oculus, offrant des possibilités inédites d’immersion. Ces technologies pourraient transformer l’expérience du jeu de rôle sur table, en y intégrant des éléments visuels et sonores enrichis, faisant ainsi s’estomper encore davantage la limite entre jeu traditionnel et jeu vidéo.
Si ces innovations technologiques offrent de nouvelles possibilités passionnantes pour les joueurs de JdR, elles soulèvent aussi des questions sur l’essence même du jeu de rôle sur table. L’automatisation croissante et l’intégration d’éléments vidéoludiques ne risquent-elles pas de dénaturer l’expérience traditionnelle du JdR, basée sur l’imagination, l’interaction humaine et la liberté de choix ?
Quoi qu’il en soit, cette tendance semble partie pour durer et il sera intéressant de voir comment les éditeurs de JdR et les développeurs de jeux vidéo continueront à faire converger leurs médiums dans les années à venir. Une chose est sûre : les joueurs n’ont jamais eu autant de possibilités pour vivre des aventures épiques, que ce soit autour d’une table ou derrière un écran.
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